Evidemment, le Père Gel a des problèmes avec le visa russe cet hiver ! A Moscou la température reste aux alentours de +3 Co et il pleut. A cause de cela même ce «Disneyland» russe a un air triste.
J’ai écrit « Disneyland » dans le sens figuré, bien sûr, mais pas sans raison.
Ce qu’il y a dans la photo, est une maquette en grandeur vraie, une reconstruction historique du palais tsariste.
Jadis en Russie les constructions pareilles s’appelaient « khoromy » (le mot est toujours au pluriel) car elles étaient en bois. Le mot « palais » - « palaty » - on l’utilisait pour les bâtiments en pierre.
L’original de cet immeuble royal existait presque en même forme et presque sur le même lieu du XVIIe jusqu’à la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Il a été démonté par ordre de la tsarine Catherine II - oui, pas tous les bâtiments historiques ont été démolis par les bolcheviks et la municipalité contemporaine. La dernière, par contre, a inspiré la réapparition de cet hybride de logement personnel et de Conseil d'Etat. On en a aussi ajouté encore une fonction – celle des salles d'exposition.
Ce n’est pas un musée car les objets historiques de cette exposition sont mélangés avec les moulages nombreux mais ne vous dépêchez pas de rire ! Pour faire vivre ces décors théâtraux il ne faut qu’un bon guide qui raconterait les détails de la vie quotidienne du tzar.
Le bâtiment a plusieurs entrées, celle est principale et en russe s’appelle « l’entrée rouge ». Pourquoi rouge ? Parce que jadis ce mot avait aussi le sens « principal », « le plus remarquable » et « le plus beau ». | Un lion et une licorne – les deux étaient également mythiques pour les Russes et apparaissaient dans le décor tsariste très souvent. Par exemple ils étaient sur le dos du trône d’Ivan le Terrible et sur les drapeaux des conquérants de la Sibérie du XVIe siècle. |
Il y avait une fois un tzar qui s’appelait Alexeï Mikhaïlovitch Romanov. Ce tsar, comme son contemporain Louis XIV, le Roi-Soleil de France, avait aussi un surnom. Pas aussi brillant mais aussi remarquable pour le chef d'un Etat. On l’appelait Alexeï Mikhaïlovitch le Paisible.
Ne pensez pas que c’est parce qu'il était un barguigneur, pas du tout ! Son règne est plein d’évènements : la réforme monétaire (qui a provoqué une émeute), la réforme d'église (qui a commencé l’histoire des vieux croyants), la communication active avec les kasaks ukrainiens (et pour conséquence une guerre contre la Pologne). Alexeï Mikhaïlovitch n'a pas eu des problèmes avec l'outre-mer mais il avait la Siberie pour champ d'action. Bref, le tsar avait de quoi s’occuper. Mais il restait paisible en aimant le plus les livres, l’astronomie, la fauconnerie et ses khoromy de Kolomenskoé.
En quelque sens c’était un bâtiment-ville (presque le rêve des premières années soviétiques !) : ses 270 pièces contenaient entre autre la salle des festins
Un morceau du vrai passé : une coupe de coco apportée d’Allemagne, début du XVIIe siècle, argent et dorure. | Jadis les murs de la salle originale étaient couvert par les tissus peints à l’or. Dans la copie c’est l'imitation de la couleur d’or qu’on a utilisé. Chaque époque a ses moyens pour faire impression. |
Il y a la salle du Conseil d'Etat et celle du trône
Dans la salle du trône il y a ... un trône bien entendu. Selon les documents historiques, les lions originaux étaient mécaniques et pouvaient pousser des rugissements ce qui produisait un effet inoubliable aux personnes présentes. C’était à la fin du XVIIe siècle. | Les animaux de trône contemporain ont aussi des voix mais leur fonction est plutôt de donner un support à l’imagination des visiteurs. N’oublions pas qu’il s’agit d’une sorte de Disneyland. |
Je dis donc que c’est pour les touristes et pas pour les historiens : l'amusement pour toute la famille - une photo en vêtements des boyards. | Cette dame est une des guides qui doivent transformer l’apparence contemporaine à l’apparence historique. Le problème est difficile mais elle a réussi. |
Il y a aussi le cabinet et la chambre à coucher du tsar et sa bania de deux pièces
La bania est un des locaux les plus importants dans la vie quotidienne en Russie ancienne. Une visite à la bania par semaine et pas de problèmes avec les dermatoses et les maladies des voies respiratoires supérieures. La bania était aussi le lieu d’accouchement. |
Dans les appartements des fils du tsar – les tsarévitchs - il y a une classe : même les tsars ne pouvaient pas se permettre d'avoir des héritiers illettrés.
L'abécédaire du fils du tsar. Chaque chapitre est consacré à un caractère et propose les images des objets dont les noms commence par ce caractère. Sous les images il y a des vers mentionnant ces objets. Bref, un système normal pour apprendre à lire. | Boussole allemande produite en 1662. Peut-être elle remplace le télescope qui appartenait à Alexeï Mikhaïlovitch ? Le tsar s'en est procuré un, étant un grand amateur du ciel étoilé. |
Les appartements féminins où habitaient la tsarine et ses filles : la salle d'audiences de la tsarine.
La femme du tsar accordait aussi les audiences. Elle s’occupait des recours en grace. En outre, elle surveillait les ateliers qui produisaient les étoffes pour les vêtements de la famille tsariste. La tsarine et ses filles faisaient elles-mêmes les étoffes pour l’Eglise. Tu es une tsarine ? - Prends ton aiguille et au boulot ;) |
Un fragment de la broderie d'ornements, XVIIe siècle, fil d’or et d'argent. |
A propos des enfants : Alexeï Mikhaïlovitch en avait 16. Aucune de ses 10 filles ne s’était mariée mais une est devenue la tsarine Russe – Sophia, la demi-sœur de Pierre I. Il était le plus jeune parmi les 6 fils d’Alexeï Mikhaïlovitch mais le plus énergique et avec la meilleure santé – les qualités qui sont obligatoires pour devenir un empereur ...
Dans le coin, ce n'est pas une colonne, c'est un four - une chose très bonne pour la santé dans les conditions de l'hiver russe ... d'un vrai hiver russe. | Une boite de cuivre pour les objets précieux de n'importe quel matériel, XVIIe siècle, Russie. |
Sophia et Pierre I ont habité aussi dans ces khoromy mais pas longtemps.
Dans le cabinet de la tsarine Sophia qui était une dame très instruite. Selon la légende, elle a mis en scène une comédie de Molière chez soi. | Selon l’histoire, elle a fondé le premier établissement d'enseignement supérieur en Russie. Outre les autres affaires. |
L'époque de la vieille Russie termine avec le règne de Sophia. Son frère, Pierre le Grand, a changé le genre de vie russe, l’européanisait. Comme Pouchkine a dit, Pierre I a « percé une fenêtre sur l'Europe » - une caractéristique très précise de la façon de cette réorganisation.
Dans la chambre d’Elisabeth I, la fille de Pierre le Grand et une des impératrices russes. Les contemporains notaient sa beauté et son humeur gaie. Les parents pensaient à son mariage avec Louis XV de France c’est pourquoi l’éducation d’Elisabeth était en français. Si ce projet avait été réalisé, nous aurions une autre histoire de l’Europe, mais les Bourbons l'ont refusé. Elisabeth est devenu l’impératrice russe sans un époux français mais avec une vraie francophilie. C’est grâce à cette femme que la noblesse russe commence à parler français comme sa langue maternelle.
Les filles de Pierre ne s’occupaient pas beaucoup du bâtiment et leur successeuse Chaterine II l’a reçu en un mauvais état. Elle a ordonné de le mesurer scrupuleusement, faire ses plans pour l'histoire et puis le démonter car la restauration n’avait pas de sens.
Deux hôtesses de khoromy tsaristes à Koloménskoé :
la première, Maria, femme d’Alexeï Mikhaïlovitch le Paisible,
et la dernière, l’impératrice Catherine II la Grande.
Pendant que j'écrivais ce billet, la neige a commencé. Si ce n'est pas une simple apparence, j'aurai une occasion pour vous raconter une des amusements hivernales russes qu'on pratique au Kolomenskoé. On verra.
Pour celui qui veut avoir sa photo en vêtements des boyards
Le palais d'Alexeï Mikhaïlovitch est ouvert:
de mardi au vendredi et le dimanche : de 10h00 jusqu'à 18h00
le samedi : de 11h00 jusqu'à 19h00.
Le lundi il est fermé
Pour y aller :
Station du métro Kashirskaya, la sortie proche au dernier wagon de la rame qui va du centre. Après l’escalier roulant il faut tourner à droite et quitter le métro. A gauche, il y a un sentier qui mène vers le passage souterrain et, après, vers le palais.
Les prix :
un billet pour tout le bâtiment - 300 roubles (environ 7 euros)
un billet pour visiter une des parties (du tsar ou de la tsarine) - 200 roubles (4,6 euros)
photos - 70 roubles (1,6)
photos en vêtements des boyards :
- une personne – 200 roubles (4,6 euros)
- deux personnes – 350 roubles (8 euros)
- trois personnes – 500 roubles (11,7 euros)
- quatre personnes – 600 roubles (14 euros)